mercredi 12 septembre 2007

Pour commencer...

Un poème que j’aime beaucoup

TU RISA (Pablo NERUDA. Poète chilien)

Tu peux m’ôter le pain
M’ôter l’air, si tu veux :
Ne m’ôte pas ton rire.

Ne m’ôte pas la rose,
Le fer que tu égrènes
Ni l’eau qui brusquement
Eclate dans ta joie
Ni la vague d’argent
Qui déferle de toi.

De ma lutte si dure
Je rentre les yeux las
Quelquefois d’avoir vu
La terre qui ne change
Mais, dès le seuil, ton rire
Monte au ciel me cherchant
Et ouvrant pour moi
Toutes les portes de la vie.
A l’heure la plus sombre
Egrènes mon amour
Ton rire, et si tu vois
Mon sang tacher soudain
Les pierres de la rue,
Ris : aussitôt ton rire
Se fera pour mes mains
Fraîche lame d’épée

Dans l’automne marin
Fais que ton rire dresse
Sa cascade d’écume,
Et au printemps, amour,
Que ton rire soit comme
La fleur que j’attendais
La fleur guède, la rose,
De mon pays sonore.

Moque-toi de la nuit
Du jour et de la lune
Moque-toi de ces rues
Divagantes de l’île,
Moque-toi de cet homme
Amoureux maladroit,
Mais lorsque j’ouvre, moi,
Les yeux ou les referme,
Lorsque mes pas s’en vont,
Lorsque mes pas s’en viennent,
Refuse-moi le pain,
L’air, l’aube, le printemps,
Mais ton rire jamais
Car alors j’en mourrais.



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